Hyundai a pris un virage serré avec sa gamme électrique Ioniq. Après une Ioniq 5 cubique, la marque revient avec une berline élancée nommée Ioniq 6. De quoi séduire ceux que l’aspect crossover rebute, d’autant que la coréenne a de nombreuses qualités pour appâter les clients.
Drôle d’engin que cette Ioniq 6. On pensait Hyundai parti pour enchaîner les créations aux arrêtes saillantes (à l’image du Tucson) et cubiques à souhait (en témoigne le Ioniq 5), mais la marque semble avoir fait un pari différent. Celui de donner une identité visuelle propre à chacun de ses modèles, et ce n’est pas le nouveau Kona qui déroge à la règle, marquant lui aussi une rupture avec son prédécesseur. La Ioniq 6, grande berline (4,86 m de long sur 1,88 m de large et 1,50 m de haut) toute en courbe inspirée du design Streamline des années 20 et 30, ne partage donc quasiment rien avec le crossover Ioniq 5, à l’exception d’une signature lumineuse reconnaissable entre mille formée par des LEDs agencées comme de gros pixels.
Si l’on excepte l’arrière franchement torturé et trop massif avec un empilement d’ailerons peu gracieux, la ligne est d’une pureté rafraîchissante alors que les designs agressifs semblent avoir les faveurs de bien des designers actuels. De quoi conférer une certaine classe à la Ioniq 6, qui ne laisse en tout cas pas indifférent si l’on en croit les très nombreux regards croisés sur la route. Pour totalement charmer votre serviteur, il ne manquerait que quelques centimètres supplémentaires en largeur et quelques-uns de moins en hauteur, afin d’asseoir la silhouette et conférer encore plus de prestance à l’auto.
Un intérieur plus classique
L’habitacle est pour sa part un peu moins impressionnant que l’extérieur, surtout pour qui a déjà posé ses fesses dans une Ioniq 5. On retrouve peu ou prou la même planche de bord, avec deux écrans juxtaposés et des raccourcis physiques sur la console centrale. Le tout est construit avec sérieux, les assemblages sont assez précis et les matériaux utilisés sont dans l’ensemble de bonne facture. Mais plus que l’agencement, finalement assez classique, c’est la place à bord qui impressionne. Les passagers arrière disposent d’une place immense pour les jambes, digne des plus grandes berlines allemandes (hors châssis-longs) ! La marge en hauteur est un peu plus restreinte à cause de la chute de toit, mais n’importe qui trouvera à s’étaler sans problème dans la coréenne, quitte à se tasser un peu dans l’assise pour les plus de 1,85 m. Le coffre, annoncé à 401 l, n’est pas des plus logeables pour une auto de cette taille, sans être ridiculement petit on plus. Heureusement, le bac situé sous le capot avant offre 45 l supplémentaire sur la version propulsion, comme ici à l’essai. Pour la 4 roues motrices la valeur tombe à seulement 14,5 l, tout juste de quoi y glisser un câble de recharge ou deux et éviter d’encombrer la soute arrière.
Raisonnablement dynamique
Enchaîner les kilomètres au volant de la Ioniq 6 se fait dans une vraie décontraction mais le confort n’est pas des plus moelleux. La suspension avant est assez ferme et l’on retrouve étonnamment un typage général plus proche de la Kia EV6 que de la Ioniq 5. Côté comportement, Hyundai vise donc des conducteurs un peu plus dynamiques que ceux de la Ioniq 5. Et en effet la berline se maintient correctement dans les courbes, faisant preuve d’un certain dynamisme tant qu’on ne la brusque pas. La direction déroute un peu au début, avec un point milieu relativement flou et une consistance très légère, même si l’on finit par s’y habituer au fil des kilomètres. Il manquerait en réalité une suspension pilotée à la Ioniq 6, pour permettre un peu plus de douceur dans les phases de conduite douces et en ville, sans pour autant faire une croix sur le comportement plaisant sur les routes tournoyantes.
Coté motorisation, Hyundai propose une seule batterie (77,4 kWh) mais deux versions : la propulsion propose 229 ch tandis que la HTRAC envoie ses 325 ch aux quatre roues. Nous avons roulé avec la plus modeste des deux, qui se montre déjà bien suffisantes dans la circulation grâce au couple instantané (350 Nm) de l’électrique. C’est aussi la version qui permettra d’aller le plus loin, avec jusqu’à 614 km d’autonomie annoncée en combinaison avec les jantes de 18 pouces (les 20 pouces amputent le total de près de 70 km). Bien sûr, cela ne tient qu’avec une consommation moyenne de 14,3 kWh/100 km (valeur homologuée sur le cycle WLTP), mais il faudra alors se montrer ultra prévenant avec l’accélérateur et user du mode i-Pedal qui offre un freinage régénératif maximal et va jusqu’à l’arrêt complet du véhicule lorsque l’on relâche la pédale d’accélérateur. Notre moyenne durant l’essai s’est établie à 20,1 kWh/100 km sur 270 km, un très bon score compte-tenu du fait qu’un bon quart du parcours impliquait de l’autoroute, empruntée aux limites légales. Lors d’un trajet périurbain d’une vingtaine de kilomètres effectué avec moult précautions, nous avons même pu descendre à seulement 12 kWh/100 km, preuve que la Ioniq 6 peut se montrer vraiment frugale si on le souhaite. Comme d’habitude, tous ces chiffres ne sont donnés qu’à titre purement indicatif et peuvent grandement varier en fonction de la conduite, du relief et de la température extérieure. Bon point pour la recharge, la Ioniq 6 accepte jusqu’à 239 kW de puissance sur les bornes compatibles, ce qui permet de regagner rapidement de l’autonomie dans les conditions idéales. Hyundai propose d’ailleurs un abonnement avec des tarifs préférentiels sur le réseau Ionity.
Des aides à la conduite vraiment intrusives
Et parce qu’il faut bien se montrer honnête et aussi parler des choses qui fâchent, les aides à la conduite auront tôt fait de rendre hystériques ceux que la surassistance énerve. Si l’on ne veut pas être envahi Il est indispensable de désactiver, à chaque démarrage, l’alerte de franchissement de ligne et l’alerte de survitesse, à défaut de sentir le volant vibrer et/ou de se faire vriller les tympans par des bips sonores et particulièrement stridents. S’il était possible de paramétrer la dernière en lui disant de n’intervenir qu’au-dessus d’un certain seuil (5, 10, 20 km/h de trop…), passe encore. Mais dans la Ioniq 6, le moindre kilomètre par heure au-dessus de la limite autorisée est sanctionné. Et comme le système se base sur la reconnaissance des panneaux de signalisation, qui n’est absolument pas infaillible et qui a franchement tendance à prendre en compte les panneaux de sorties d’autoroute ou les aires de repos alors que l’on circule simplement sur la voie de droite, c’est vite la zizanie !
Le pire, c’est que certaines fonctionnalités ne sont tout simplement pas désactivables, à l’image du détecteur d’attention du conducteur, qui décide arbitrairement qu’il va venir gazouiller à vos esgourdes pour un rien. Vos moindres faits et gestes sont épiés, si bien que regarder le GPS peut se solder par un bip un brin énervant et un message sur le combiné d’instrumentation. Bref, c’est à se demander à quel point ces « aides » en sont réellement, et si l’on ne voudrait tout simplement pas faire des humains des conducteurs abrutis, incapables de la moindre décision par eux-mêmes. Surtout qu’à multiplier les alertes sonores et sensitives, on est très vite détourné de la conduite et l’on ne sait plus quel message la voiture souhaite nous communiquer, ce qui peut être, en définitive, contreproductif et devenir une réelle source de stress. Dommage pour Hyundai, d’autant que ce flicage électronique occulte des fonctionnalités vraiment utiles, comme la caméra d’angle mort qui s’affiche à la place des compteurs dès qu’un clignotant est activé, vrai gage de sécurité pour éviter de déboiter à l’aveugle.
Pas donnée mais sans véritable concurrence
L’objet intrigue, attire et interpelle, c’est donc gagné pour Hyundai qui vient s’installer sur un segment encore timide en concurrence. A mi-chemin entre une Tesla Model 3 et une Model S, pas tout à fait en face d’une BMW i4, elle veut faire son trou et se montre agréable au quotidien pour y parvenir, tout en se montant prometteuse sur ses consommations. Encore faut-il pour ça que les aides à la conduite intrusives ne soient pas un défaut rédhibitoire pour vous, mais aussi que vous soyez en mesure de débourser pas moins de 52 300 € pour la finition d’entrée de gamme, ou carrément 61 400 € pour la finition haute Executive de notre modèle d’essai. La version à quatre roues motrices, uniquement compatible avec la finition Executive, réclame pour sa part 65 300 €. Cher, mais comme il est de coutume avec les constructeurs coréen, il n’y a quasiment pas d’options qui pourraient faire doubler la note. On trouve seulement des peintures (entre 690 et 990 €), un toit ouvrant (750 €, ou de série sur Executive), et des rétroviseurs extérieurs remplacés par des caméras (1 200 €, seulement sur Executive) que nous n’avons pas pu essayer.