Kia fait le pari qu’avoir un porte étendard est le meilleur moyen de booster son image. Sa gamme électrique s’étend donc aujourd’hui par le haut, avec un EV9 abouti et technologique.
Quand le constructeur coréen a présenté la berline Stinger en 2017, c’était un pavé dans la marre pour espérer éclabousser les sceptiques qui voulaient condamner la marque à n’être qu’une entité généraliste bon marché. Puissante (jusqu’à 370 ch), bien finie et suffisamment statutaire pour faire tourner les têtes, elle ne s’est que très peu vendue en France à cause d’un prix élevé et d’un malus important, mais elle a tout de même servi de démonstration dans le monde pour prouver les ambitions de la marque. Quelques années plus tard, Kia a lancé une grosse offensive électrique commencée avec l’EV6, qui se poursuit aujourd’hui avec l’arrivée sur le marché de l’EV9. Gigantesque pour nos routes (5,01 m de long pour 1,98 m de large sans rétroviseurs et carrément 1,78 m de haut), le grand gaillard attire immédiatement l’attention !
D’autant qu’avec ses airs de concept car homologué, il ne passe pas inaperçu même face à des gros SUV allemands. Malgré un look très carré, ses surfaces sont toutefois savamment étudiées pour que le CX ne dépasse pas 0.28, soit un score étonnamment aérodynamique pour un véhicule à la surface aussi imposante. On aime ou on déteste, mais entre le gabarit et l’effet nouveauté, l’EV9 ne laisse pas indifférent partout où il passe.
Habitabilité géante
Là où le coréen brille, c’est côté habitacle avec un espace à bord vraiment généreux. Il est d’office proposé avec trois rangées de sièges et 7 places, mais la finition haute GT-Line peut aussi être commandée dans une rare configuration 6 places (option gratuite) avec deux fauteuils indépendants au deuxième rang. Ces dernier sont coulissants sur une très grande amplitude et peuvent même pivoter ! Soit de 90° vers l’extérieur, ce qui est bien pratique pour manipuler un siège bébé et attacher des enfants, soit carrément de 180° vers l’intérieur pour se retrouver face aux deux sièges de la troisième rangée. Génial à l’arrêt pour un peu plus de convivialité pendant les recharges ! Quant aux deux sièges les plus au fond, ils disposent de dossiers inclinables électriquement et sont bien plus que de simples strapontins. Si ce n’est une assise un petit peu courte, ils sont tout à fait aptes à accueillir deux adultes sans que ces derniers ne soient recroquevillés.
Assez ergonomique et bien fini
Les mieux lotis sont toutefois les passagers avant, qui disposent de sièges moelleux, chauffants, ventilés et massants, réglables électriquement dans tous les sens et dont les appuie-têtes sont aussi souples que des oreillers. C’est aussi à l’avant que l’on profite de la planche de bord épurée et bien construite. Si avoir placé les commandes de climatisation sur un petit écran tactile coincé entre le combiné d’instrumentation numérique et l’écran multimédia (lui aussi tactile) n’est pas des plus pratiques pour le manipuler, Kia a eu le bon sens de placer des raccourcis physiques pour la température et la ventilation. Ces fonctions essentielles sont ainsi facilement accessibles.
Même combat pour le volant qui conserve des boutons physiques qu’il suffit de mémoriser pour les utiliser sans même les regarder. Quant aux raccourcis sensitifs sous l’écran, ils disposent d’un retour haptique qui confirme le clic, de sorte que l’on sait quand une fonction est activée. Pour le reste, les plastiques et matériaux recyclés utilisés dans l’ensemble de l’habitacle sont valorisants, faisant de l’EV9 la Kia la plus cossue à ce jour.
A l’aise sur la route
L’EV9 repose sur la plate-forme électrique e-GMP du groupe Hyundai Kia. Cette dernière dispose d’une architecture 800V, ce qui permet de garantir jusqu’à 210 kW de puissance de charge. Un atout indéniable pour ne pas passer trop de temps à remplir l’immense batterie de 99,8 kWh. Laquelle fournit, sur la déclinaison GT-Line, 385 ch et pas moins de 700 Nm de couple au total, répartis entre les moteurs avant et arrière. La Kia est donc véloce en ligne droite et très à l’aise pour toutes les insertions sur l’autoroute ou les dépassements. Son châssis est en outre bien calibré, car il fait la part belle au confort (la filtration des aspérités est meilleure que sur l’EV6) sans pour autant être dénué d’un certain dynamisme. Il se contente pourtant d’amortisseurs semi-passifs (ils réagissent simplement à la fréquence des chocs mais ne sont pas pilotés depuis l’habitacle) et se passe de raffinements technologiques comme des roues arrières directrices ou encore des barres antiroulis actives.
Le grand volant et la direction très démultipliée n’incitent de toute manière pas à rouler couteau entre les dents, mais les enchaînements de virages ne font pas peur à l’EV9 qui parvient à masquer ses 2 569 kg à vide assez habilement tant qu’on ne le brusque pas. Il faut dire qu’avec des jantes de 21 pouces et des pneus en 285 de large aux quatre coins, la surface au sol est conséquente… C’est sur le mouillé qu’il faudra se méfier de cette immense masse en mouvement, qui peut alors se montrer piégeuse. Sur le sec en tout cas, l’ESP intervient finement et rapidement pour éviter toute glissade.
Lors de l’essai, la consommation moyenne s’est établit à 21,7 kWh/100 km, soit de quoi parcourir en théorie plus de 450 km en une seule charge. Un score qui variera évidemment en fonction de votre trajet, et qui sera bien moins flatteur sur autoroute où la consommation sera plus élevée. Mais voyager en EV9 n’a rien d’incongru et le seul point véritablement irritant pour le conducteur sera la prolifération des aides à la conduite très intrusives et réactivées à chaque démarrage. Alerte de survitesse qui bip dès qu’elle détecte un panneau de limitation et que l’on est 1 km/h au-dessus, aide au maintient dans la voie qui refuse que l’on se rabatte après un dépassement malgré le clignotant droit remis, détecteur de pré-collision qui s’affole si l’on circule dans une rue où le stationnement est autorisé par alternance sur un côté puis l’autre de la chaussée ou encore alerte de baisse d’attention du conducteur qui bip dès que l’on regarde l’écran du GPS pendant plus de 1,5 secondes sont par exemple autant de systèmes « d’aide » qui deviennent plus envahissants qu’autre chose et qu’il faut prendre le temps de désactiver à chaque début de trajet si l’on en a cure. Heureusement que l’on peut utiliser une touche de raccourci du volant pour accéder directement au menu des ADAS sur l’écran tactile, mais cela n’en reste pas moins horripilant qu’il ne soit pas possible de configurer une bonne fois pour toute la voiture que l’on veut, sans devoir tout refaire dès que le moteur est coupé.
Tarifs en conséquence
Évidemment, les bonnes prestations de l’EV9 ne sont pas bradées. Pour la configuration de notre modèle d’essai (finition haute GT-Line, forcément associée à la plus grosse motorisation et avec une peinture optionnelle à 900 €), c’est 86 900 € qu’il faut mettre sur la table pour repartir avec. Mais si l’on regarde la catégorie des grands SUV électriques (segment E), on trouve un BMW iX qui démarre à 84 200 €, un Mercedes EQE SUV dont le ticket de base est de 93 400 € ou encore un Volvo EX90 facturé au moins 89 500 €. Et encore, le BMW ne propose que 5 places, contre 7 pour les Mercedes et Volvo. Pour faire baisser un peu le prix du Kia, on peut opter pour la finition de base sobrement baptisée EV9, déjà très bien équipée mais qui se contente d’un seul moteur électrique placé à l’arrière, pour 204 ch et 350 Nm de couple. Le prix tombe alors à 73 000 €, mais les performances sont évidemment bien moins impressionnantes, avec un 0 à 100 km/h qui passe de 5,3 à 9,4 s. Quoi qu’il en soit, le Kia EV9 est un produit abouti, bien conçu et bien construit, qui ose s’aventurer sur un terrain où seuls les constructeurs premium sont pour l’instant présents. Seul l’avenir dira si le pari de Kia sera payant, d’autant que la marque a les dents longues avec 1 000 unités prévues en année pleine.