Pourquoi de nombreux constructeurs automobiles réinvestissent-ils dans le moteur thermique ?

Plusieurs constructeurs automobiles ont pris la décision de revenir aux moteurs thermiques, malgré les exigences de Bruxelles en matière d’électrification, en réinvestissant dans les véhicules à combustion interne et hybrides. Cette tendance de groupe présente des risques pour les grands noms de l’industrie automobile.

Une annonce surprenante a récemment secoué le secteur : Jean-Philippe Imparato, le nouveau patron de Stellantis pour l’Europe, a exprimé son intention de revenir aux moteurs thermiques. Après le départ de Carlos Tavares fin 2024, la stratégie de l’entreprise a évolué. Plus étonnant encore, selon nos confrères des Échos, plusieurs projets de moteurs diesel seraient en cours, une direction totalement opposée aux engagements pris ces dernières années par le groupe.

Des sources ont révélé que Stellantis envisageait d’adapter l’un de ses modèles aux nouvelles normes environnementales, afin de prolonger sa production de 2025 à 2030. En contradiction avec les objectifs européens, la société pourrait même développer un nouveau moteur diesel, une surprise étant donné la baisse de 11,4 % des ventes de diesel dans l’Union européenne en 2024. Mais Stellantis n’est pas la seule à revoir sa position. D’autres marques, comme General Motors, Porsche, BMW, Volkswagen et Mercedes, ont également annoncé un retour vers les moteurs thermiques. Bien que le moteur thermique pur soit en déclin, l’hybridation connaît un regain d’intérêt et reste une solution de transition qui perdurera plus longtemps que prévu. Selon S&P Global Mobility, 205 modèles à essence et 116 véhicules hybrides seront lancés en 2025. Mercedes, par exemple, prévoit de dévoiler 19 voitures à essence contre seulement 17 électriques entre 2025 et 2027.

Porsche, après une chute de 49 % des ventes de sa berline électrique l’année dernière, revoit sa stratégie et envisage de proposer certaines voitures initialement conçues pour être 100 % électriques avec des versions thermiques. Un changement qui représente un coût de près de 800 millions d’euros. Smart et DS suivent aussi cette tendance : le #5 de Smart sera le premier modèle à adopter un moteur à essence, tandis que la DS N°8, initialement prévue pour être entièrement électrique, sera déclinée en version hybride. Volkswagen, quant à lui, pourrait prolonger la production de modèles thermiques comme la Golf, le T-Roc et le Tiguan au-delà de 2033.

Pourquoi ce revirement ? Les constructeurs historiques font face à un défi majeur : bien qu’ils investissent massivement dans l’électrification, les ventes de véhicules électriques n’augmentent pas suffisamment vite. Les moteurs thermiques, quant à eux, restent des sources de bénéfices essentielles. Ola Källenius, le patron de Mercedes, a d’ailleurs souligné qu’il serait “peu judicieux” de cesser l’activité thermique, jugée “saine et rentable”. Comme l’explique le Financial Times, en attendant la démocratisation des véhicules électriques, remettre l’accent sur les moteurs thermiques permet aux marques de “consolider leurs bénéfices”.

Dans ce contexte, les voitures hybrides, qui combinent une petite batterie avec un moteur thermique, connaissent un succès croissant en Europe. Ces modèles sont rentables et permettent aux constructeurs de respecter les objectifs CO2 imposés par Bruxelles.

Cependant, cette stratégie duale comporte des risques pour les grandes marques. Tandis qu’elles se concentrent à la fois sur l’électrique et le thermique, les constructeurs asiatiques, eux, continuent d’intensifier leurs efforts. En 2025, la Chine pourrait connaître un tournant majeur, avec des ventes de véhicules électriques dépassant celles des véhicules thermiques (12 millions d’unités). Cette étape marquerait une domination de plus en plus marquée de la Chine dans le secteur de l’électrique.